58 ans déjà: le traité d’amitié franco-allemand : une réussite ! – par Prof. Dr. Jochen Mecke

58 ans déjà: le traité d’amitié franco-allemand : une réussite !
Les images sont devenues célèbres par la suite : Lorsque Charles de Gaulle et Konrad Adenauer ont signé le traité d’amitié franco-allemand, également connu sous le nom de traité de l’Élysée, le 2 janvier 1963, un des nombreux malentendus franco-allemands qui ont longtemps caractérisé les relations entre les deux nations s’est produit. Après le discours émouvant du président français et un discours bref de Konrad Adenauer qui s’est contenté d’approuver pleinement son collègue français, de Gaulle a déjà ouvert ses bras et s’est dirigé vers Adenauer, qui – comme on peut le voir clairement sur les photos d’archives – a reculé, un peu effrayé, jusqu’à ce qu’un officier du protocole à l’esprit éveillé le pousse résolument vers De Gaulle et que tous deux s’embrassent selon les règles de l’accolade française. Lorsqu’Adenauer, visiblement touché par le geste émouvant de de Gaulle, tend encore la main pour échanger une poignée de main chaleureuse avec son collègue  français, ce qui, dans sa génération, était la plus haute expression de sympathie entre hommes, de Gaulle a déjà reculé et la main d’Adenauer reste dans le vide. Parfois, comme nous le savons tous, une image en dit plus long que mille mots. Et ici, les images du film résument des siècles entiers de relations franco-allemandes. Ils nous montrent que les Allemands et les Français ont peut-être toujours voulu la même chose, mais presque jamais en même temps et toujours par des moyens différents. Quand les Français ont voulu la paix, les Allemands ont préparé la guerre ; quand les Allemands étaient devenus pacifistes, les Français se sont appuyés sur leur puissance nucléaire. Cette règle s’applique également aux intentions que les deux nations ont associées au traité, car elles ont certainement été façonnées par des intérêts différents. Alors que la principale préoccupation de la France était de libérer l’Europe de la domination américaine et de creuser un fossé entre les États-Unis et l’Allemagne, la principale préoccupation de l’Allemagne était d’intégrer la France dans un réseau international et multilatéral de traités. Cela a conduit le Bundestag allemand à ratifier le traité avec un préambule qui a provoqué un désaccord entre les deux pays, peu de temps après sa signature, car il appelait la France et l’Allemagne à travailler plus étroitement avec les États-Unis et à intégrer la Grandedans la Communauté économique européenne.
Les grands espoirs que de Gaulle avait placés dans les Allemands et le traité sont donc immédiatement anéantis. Et pourtant, aucun traité d’amitié n’a peut-être été plus important pour le développement de l’Europe et n’a eu des conséquences plus durables que le traité de l’Élysée, car il a jeté les bases d’une consultation et d’une coopération franco-allemande intenses et durables, qui se sont ensuite poursuivies de manière cohérente lors de réunions conjointes régulières des ministères allemands et français, des réunions de cabinets binationaux, dans l’idée plus tard abandonnée de la double citoyenneté, et qui ont abouti 56 ans plus tard, le 22 Janvier 2019, lors de la cérémonie de signature du Traité d’Aix-la-Chapelle dans la salle des couronnements de l’Hôtel de ville.
Malgré toutes les différences d’intérêts entre la France et l’Allemagne, il y avait cependant un motif qui a marqué les deux nations après les cruelles expériences de la Première et surtout de la Seconde Guerre mondiale : « Plus jamais de guerre en Europe … et surtout pas entre l’Allemagne et la France » était la devise qui a déclenché un formidable élan pour la croissance commune de l’Europe au-delà des deux nations à gauche et à droite du Rhin. Et parce que les nations concernées savaient que les bonnes intentions ne suffisaient pas à elles seules à empêcher les guerres, elles les ont associées à des intérêts économiques concrets qui ont lié toutes les nations européennes concernées dans un réseau étroitement imbriqué de coopération et de dépendance économiques mutuelles, la « Communauté Européenne du charbon et de l’acier », qui a ensuite conduit à la fondation de la Communauté économique européenne (CEE) en 1957. Au début, comme souvent, il y a eu une vision, celle d’un Français, à savoir le ministre français des affaires étrangères Robert Schumann qui, en étroite collaboration avec le chancelier allemand Konrad
Adenauer, a assuré la fondation de la première organisation supranationale jamais créée. L’idée frappante derrière ce premier succès de la nouvelle amitié franco-allemande – six ans seulement